La sixième réunion annuelle de FRATEL a rassemblé à Tunis les membres du réseau francophone de la régulation des télécommunications et des acteurs du secteur des télécommunications.
A l’invitation de l’Instance Nationale des Télécommunications de Tunisie (INTT), une centaine de participants se sont réunis durant deux jours afin de partager leurs expériences concernant « les effets de la régulation sur le développement de la concurrence » , suivants trois tables rondes :
Table ronde 1 : Comment concilier ouverture à la concurrence et investissement dans le secteur des télécommunications
Cette première table ronde, présidée par M. Ali GHODBANI, Président de l’Instance Nationale des Télécommunications de Tunisie (INTT) a été introduite par M. Marc FURRER, Président de la Commission fédérale de la Communication suisse (COMCOM).
M. FURRER a rappelé la nécessité de promouvoir les investissements dans les réseaux et de développer la concurrence, par exemple en favorisant les MVNO avant de laisser la parole aux intervenants qui ont exposé des cas pratiques à partir de la situation de leurs pays respectifs.
La présentation de M. FURRER :
Mme Joséphine ADOU, Sous Directrice des Etudes et des Travaux Neufs à l’Agence des Télécommunications de Côte d’Ivoire (ATCI) a présenté l’intérêt et les insuffisances des deux moyens complémentaires d’introduction de la concurrence sur le marché : par les infrastructures d’une part, et par le développement de services à valeur ajoutée d’autre part. Les investissements en infrastructure atteignent 800 milliards de francs CFA en Côte d’Ivoire et la couverture du pays atteint aujourd’hui grâce à la promotion de la concurrence par les infrastructures plus de 50% du territoire.
La présentation de Mme ADOU :
Mlle Sihem TRABELSI, de l’INTT, a présenté la forte croissance du marché des TIC en Tunisie et défendu l’importance du développement d’une concurrence par les infrastructures, qui représente selon elle une condition nécessaire à la création de la demande et des investissements. La concurrence par les infrastructures doit être inter modale selon elle (associant différentes technologies) et non intra modale (se concentrant sur une seule technologie) car ce mode permet des investissements plus innovants.
La présentation de Mlle TRABELSI :
Enfin, M. Clément LAMBRINOS, Consultant chez Polyconseil, a rappelé que la conjugaison de la pression des économies d’échelle et de la pression concurrentielle doit permettre au régulateur de construire sur le marché un équilibre entre des investissements rentables et innovants et des prix bas et des services innovants. La régulation dissymétrique permet d’accompagner les nouveaux entrants vers l’autonomie technique et financière, le régulateur doit s’assurer que le prix soit de plus en plus attractif pour les entrants à mesure qu’ils se rapprochent, dans le réseau, du consommateur.
La présentation de M. LAMBRINOS :
Table ronde 2 : Quelle gestion des ressources rares pour favoriser l’arrivée de nouveaux entrants ?
Présidée par M. Jean-Louis BEH MENGUE, Directeur général de l’Agence de régulation des télécommunications du Cameroun (ART) et introduite par M. Eric VEVE, avocat et consultant juridique, la deuxième table ronde s’est concentrée sur la manière de gérer les fréquences pour favoriser l’arrivée de nouveaux entrants.
M. VEVE a rappelé le principe de non discrimination dans la gestion des ressources en fréquences et les différentes procédures d’attribution. Il a illustré son intervention en présentant les composantes de la procédure qui a été mise en œuvre en France pour l’attribution des licences Wimax (un concours de beauté incluant une dimension d’enchère).
La présentation de M. VEVE :
Aujourd’hui en Tunisie, comme l’a commenté M. Moez LAJIMI, Directeur de la qualité de l’Agence Nationale des Fréquences tunisienne, faciliter l’arrivée de nouveaux entrants consiste à aménager le spectre (la bande 3.4 – 3.6 GHz a par exemple été libérée pour être redéployée) et à exiger des opérateurs l’optimisation de l’utilisation des fréquences. Il a expliqué pourquoi en Tunisie, territoire peu étendu, la licence est nationale et nominative.
La présentation de M. LAJIMI :
M. Peter RENDOV, Membre de la Commission de Régulation des Communications de Bulgarie (CRC) est revenu sur les sujets essentiels en matière de gestion des fréquences : l’harmonisation, la neutralité technologique, la fixation des prix, les obligations à imposer et les procédures d’octroi et de contrôle des fréquences.
Selon M. Michael ZARD, Consultant du cabinet Polyconseil, l’objectif est de renforcer l’attractivité globale du secteur en agissant à l’endroit le plus limitant, au niveau des réseaux d’accès ou réseaux de collecte.
La présentation de M. ZARD :
M. Marcelin MONTAIGNE, Directeur général du Conseil National des Télécommunications de Haïti (CONATEL) a rappelé les caractéristiques géographiques et démographiques d’Haïti et l’ancienneté du cadre réglementaire du secteur (1987), aujourd’hui dans une phase de réforme. M. MONTAIGNE a insisté sur l’importance dans des pays tels que le sien de la gestion des fréquences puisque la téléphonie mobile représente le secteur moteur dans lequel de nouveaux opérateurs peuvent investir.
Par ailleurs, l’Autorité Nationale de Régulation des Télécommunications du Burkina Faso (ARTEL) n’est pas intervenue à cette table ronde mais a proposé un exposé sur ce sujet au travers de son expérience pour la technologie CDMA.
Présentation de l’ARTEL :
Table ronde 3 : Faut-il réguler les oligopoles ?
La troisième table ronde a porté sur la manière de réguler les oligopoles. Présidée par M. Philipp METZGER, Vice-directeur de l’Office fédéral des communications suisse (OFCOM), la table ronde a été introduite par un exposé de M. Michel FENEYROL, Consultant et ancien Membre de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes de France (ARCEP), qui a rappelé les évolutions d’un secteur souvent caractérisé par des oligopoles et expliqué pourquoi il s’avère nécessaire de les réguler et rappelé la complexité de cette régulation.
La présentation de M. FENEYROL :
Mme Claire AUDIN, Associée du Cabinet de conseil Clarity, a illustré ces propos par les marchés des mobiles et a noté par exemple qu’en Asie du Sud Est l’ARPU est bien inférieur à celui que l’on trouve en Afrique. Aujourd’hui les pistes envisagées pour dynamiser les marchés mobiles, qui du fait de la rareté de fréquences se constitue de manière oligopolistique, est le lancement des procédures d’attribution de licences de troisième génération et l’introduction d’opérateurs mobiles virtuels.
La présentation de Mme AUDIN :
M. Moctar TRAORE, Directeur du service Economie et Concurrence au Comité de régulation des télécommunications du Mali (CRT), a rappelé que les secteurs des télécommunications oligopolistiques peuvent entraîner des accords illicites entre les membres. Au Mali, un duopole s’est aujourd’hui mis en place dans le secteur des télécommunications mobiles, impliquant des litiges réguliers entre les deux opérateurs, sur les tarifs de l’interconnexion notamment.
La présentation de M. TRAORE :
Comme a indiqué ensuite M. Moez CHACKCHOUK, Directeur de l’Unité Technique de l’INTT, cette situation de duopole existe également sur le marché mobile tunisien et correspond à une étape d’un développement progressif de la concurrence en Tunisie. L’INTT s’interroge aujourd’hui sur le fait de changer ou non cette situation alors que le taux de couverture géographique atteint pour chacun des deux acteurs est supérieur à 99% de la population.
Enfin, M. Nicolas CURIEN, Membre de l’ARCEP, a introduit son exposé en indiquant que le régulateur a les oligopoles qu’il mérite, avant d’expliquer qu’avec la convergence, deux oligopoles se confrontent sur les marchés TIC : celui des contenus et celui des réseaux. L’objectif du régulateur est de parvenir à une concurrence effective mais aussi auto entretenue, cette situation permettant de « symétriser » la régulation ex-ante et de la transférer en partie vers l’ex-post.
La présentation de M. CURIEN :
ATELIER sur la régulation postale
Table ronde 1 : La mise en place du cadre de régulation postale
Cette première table ronde a été présidée par M. Boubacar THOURE, Membre du Conseil de l’ARTP du Sénégal, Président de FRATEL, qui a exposé les conditions qui ont entrainé le Sénégal à ouvrir son marché postal, et notamment la Lettre de politique sectorielle qui a amené l’Agence de régulation des télécommunications sénégalaise à s’occuper du secteur postal depuis 2006 (loi du 4 janvier 2006).
M. Peter RENDOV, Membre du Collège de la Commission de Régulation des Communications de Bulgarie a présenté, à travers l’expérience bulgare et le processus européen de libéralisation des activités postales, les principales questions de régulation.
M. Adel GAALOUL, Président et Directeur général de la Poste tunisienne, a présenté les activités de l’entreprise, en insistant sur la qualité du service fourni par l’opérateur et sur l’intégration des communications électroniques dans ces activités postales, en évolution et de plus en plus innovantes.
M. Sidy GNOM, Directeur des Etudes et de des Projets de la Poste du Sénégal a indiqué que la lettre de politique sectorielle de son pays insiste non seulement sur l’accès pour le plus grand nombre à un service postal de qualité à un prix abordable (contrat de performance avec l‘Etat), et souligne l’importance de la modernisation du secteur.
Les représentants du Bénin, de l’Algérie, du Niger, de la Guinée, du Cap Vert, du Mali, de la Suisse, de Mauritanie et du Togo ont décrit la situation dans leur pays et insisté sur l’importance d’échanger sur la régulation du secteur postal qui se met aujourd’hui progressivement en place.
Table ronde 2 : Quel modèle de distribution afin de garantir un service de qualité dans un marché en évolution ?
La deuxième table ronde, présidée par Mme Joëlle TOLEDANO, Membre de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes de France (ARCEP) s’est concentrée sur les modes distribution du service postal.
M. José ANSON, Expert en Economie Postale de l’Union postale universelle (UPU) a introduit les discussions en présentant l’étude de l’UPU réalisée dans 26 pays d’Afrique subsaharienne, représentant 91% des envois postaux dans cette région. Il ressort clairement de cette étude que la distribution universelle n’est pas assurée et que le coût total de la transaction (tarifs payés par l’expéditeur et le récepteur, marché biface) est très important en raison du mode même de répartition entre expéditeur et destinataire (prix des boîtes postales à la charge des destinataires trop élevé). L’insatisfaction des opérateurs de services collectifs (eau, électricité, télécommunication) est telle qu’elle a conduit à la prise en charge opérationnelle de la distribution par les entreprises elles-mêmes. La distribution représente un des problèmes essentiels pour le développement du trafic en Afrique.
Le Directeur général de l’Autorité de régulation guinéenne a fait part de son interrogation sur la suppression des coûts des boîtes postales dans le coût de transaction. Il reconnait qu’il faudrait tout du moins le rendre abordable, ce qui pose la question de l’évaluation de ce prix abordable.
Le représentant de la Poste sénégalaise a rappelé que le premier obstacle au développement du trafic est selon lui en Afrique le problème de l’adressage. S’agissant de la qualité du service, il est plus facile de l’évaluer avec des boîtes postales. Il a ainsi présenté l’initiative de certaines banques sénégalaises qui essaient de faciliter le développement et l’accès à ces boîtes car elles représentent un moyen de domiciliation pour les populations, essentielles pour leur activité.
Les représentants du Bénin, de l’Algérie, de la Guinée, du Mali, de la Suisse, de Mauritanie, de la Bulgarie et du Burkina Faso ont débattu des résultats de l‘étude selon la situation dans leur pays et se sont interrogé sur les solutions de substitution à la distribution en boîtes postales qui jouent un rôle essentiel.
Programme atelier regulationpostale (PDF)
Enfin, la sixième réunion annuelle a permis de faire le bilan des différents projets de FRATEL en 2008 et a été l’occasion de définir les actions à mettre en oeuvre pour l’année 2009.
Le rapport d’activité :
Rapport d’activité 2007-2008 (PDF)
Le plan d’action :
Programme et rapport de la sixième réunion annuelle :